Vins de Bordeaux Les Côtes de Castillon à l’est de Saint-Émilion
A l’est de Saint-Émilion, le vignoble des Côtes de Castillon est la nouvelle coqueluche girondine. La qualité est à la hausse, les prix sont restés sages : en dix ans, cet ex-«petit bordeaux» est devenu un sérieux rival pour ses prestigieux voisins.
Il y a douze ans, alors qu’ils s’appelaient encore bordeaux-côtes-de-castillon, imaginer que les meilleurs de ces vins se vendraient aujourd’hui mieux que des saint-émilion, leurs illustres voisins, était farfelu. Pourtant, ils l’ont fait !
Site historique où se déroula l’ultime bataille de la guerre de Cent Ans en 1453, situé dans le prolongement du fameux plateau argilo-calcaire de Saint-Emilion, la région de Castillon-la-Bataille a longtemps été un réservoir de bons bordeaux pour le négoce. Se gardant d’en ébruiter la qualité pour maintenir des prix bas, le commerce de gros en tirait avantageusement parti en assemblant les bordeaux côtes-de-castillon avec d’autres bordeaux beaucoup plus ordinaires.
Les “mauvaises langues” vont même jusqu’à parler de “vin médecin”pour les saint-émilion grands crus. Au milieu des années 80, au sein du syndicat viticole, la grogne monte. Un groupe de propriétés, lasses d’être ainsi inféodées, décident de militer pour l’indépendance, de faire valoir la qualité intrinsèque de leur terroir et donc de quitter la famille des bordeaux génériques.
En 1989, l’INAO avalise le projet et une nouvelle appellation bordelaise est née : Côtes de Castillon. Mais à une condition : que l’appellation, délimitée sur neuf communes (2850 ha), mette de l’ordre dans ses vignes.
Dans les années 70, ce vignoble planté majoritairement de merlot avait été aménagé pour produire des bordeaux à moindre coût (en vignes larges, facilement mécanisables). Les densités de plantation étaient descendues à 2500 pieds par hectare. Une situation incompatible avec les objectifs qualitatifs que s’est fixée la nouvelle appellation.
L’intégralité du vignoble devra être remontée au minimum à 5000 pieds/ha d’ici à une quinzaine d’années. Presque les deux tiers des vignes sont déjà dans la norme. Mais si les vignerons acceptent ces concessions, c’est que le succès des côtes-de-castillon est au rendez-vous.
Un succès que l’on doit bien sûr à une vingtaine de vignerons locaux, mais surtout à l’arrivée de “grosses pointures” de Saint-Emilion, qui ont rapidement saisi le potentiel de ce terroir. Revers de la médaille, ces investisseurs ont fait flamber le prix des vignes, passé en 4 ans de 200 à 400 000 F l’hectare. Ces nouveaux venus créent aussi une saine émulation entre les propriétés et engendrent une réelle montée qualitative.
Pour l’amateur, c’est le moment de s’intéresser à ces bordeaux de bonne garde qui n’ont pas la grosse tête.